Joseph, un sac de billes et un violon

Publié le par la liseuse paresseuse

C'était un vrai conteur, Joseph Joffo. Un conteur du tragique, un conteur de l'improbable, de l'absurdité qui devient réalité. 

Joseph Joffo est mort, il y a quelques jours, et j'en ai eu une peine terrible, parce que 2 de ses romans m'ont accompagnée. Il y a bien sûr "un sac de billes" mais aussi "Anna et son orchestre" que j'avais relu il y a peu. 

Commençons par "un sac de billes" qui l'a rendu célèbre, alors qu'il était un coiffeur réputé. Immobilisé à la suite d'un accident, il écrit ses souvenirs d'enfance. Et quelle enfance! Une enfance sous l'Occupation. Une enfance... de petit garçon juif. 

Joseph raconte alors l'heureuse vie parisienne avec ses parents aimants, ses frères. Une vie qui prend un virage radical le jour où sa mère doit coudre au revers de son manteau une étoile jaune. Une étoile frappée de ce mot "JUIF", qui lui vaudra des regards différents à l'école, une mise à l'écart, le sentiment d'être un autre aux yeux des autres alors qu'on est le même, et une belle bagarre. Ainsi, enfin, qu'un sac de billes offert par un copain en échange de l'étoile. 

Les parents comprennent qu'il faut protéger Joseph, et Maurice, son frère, qui sont encore si jeunes. C'est le début d'un long périple vers la zone dite libre, où la débrouillardise et l'ingéniosité des 2 garçons feront merveille. 

Cette errance semble s'arrêter à Nice, où la vie paraît redevenir belle et insouciante. Mais la guerre continue, et la zone libre n'est bientôt plus : les italiens s'en vont, les nazis arrivent. Il faut à nouveau se cacher, mais une simple imprudence suffit à tout faire basculer. Encore. Et les garçons font preuve d'un courage inouï et d'une ingéniosité incroyable. Encore. 

"Un sac de billes" est devenu, je le crois et l'espère, un classique des lectures adolescentes. C'est à la fois une leçon d'Histoire, un roman d'aventures, une leçon de courage, un roman picaresque et un sacré témoignage sur la vie de 2 enfants juifs dans la France occupée. Un roman qui se lit entre rires et larmes, entre tendresse et angoisse. 

"Anna et son orchestre" est l'histoire un peu romancée de la mère de Joseph Joffo. Anna, née Markov dans la Russie tsariste. Chez les Markov, famille plutôt aisée, nombreuse et aimante, on est musiciens. La musique, c'est la vie, c'est le ciment de cette tribu. Mais la Russie tsariste n'aime pas beaucoup les juifs, et la succession des pogroms obligera bientôt tout le monde à fuir. 

Ce roman est un voyage autant qu'une fuite à travers l'Europe orientale du début du XXème siècle, d'Istanbul à Budapest, en passant par Vienne et Paris. C'est une histoire folle, endiablée, tragique souvent, drôle parfois. 

Joseph Joffo raconte la jeunesse itinérante de sa mère avec une tendresse infinie, en nous montrant combien son talent et celui de ses frères ont permis à toute la famille de survivre, toujours. 

C'est romanesque en diable, raconté comme un conte, un conte pour grands enfants, un conte cruel sur l'histoire européenne de la première moitié du XXème siècle. Une histoire qui s'achève à Paris, dans l'entre deux guerres. Une histoire "à suivre"... 

 

La chanson qui va bien avec : "comme toi" de JJ Goldman 

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