combien de H dites-vous? [Laurent Binet -HHhH-]

Publié le par la liseuse paresseuse

hhhh-laurent-binetUn titre pas possible... Pour un roman remarquable

 

Alors attention il y a bien 4 H dans le titre de l'extraordinaire roman de Laurent Binet, lauréat (et c'est mérité) du Goncourt du premier roman 2010 : HHhH pour Himmlers Hirn heiβt Heydrich soit le cerveau d'Himmler s'appelle Heydrich.

 

ah ah : Himmler, heydrich, bons gros nazis, on se dit qu'on va bien se poiler...Ou pas...

 

eh bien croyez moi : oui on rit, car l'auteur a monté une construction très astucieuse. il alterne les phases qui parlent de la genèse de son roman, donc de lui, de sa vie, de ses doutes, de ses scrupules d'écrivain (comment romancer la vie d'Heydrich? impossible!!!) et les passages historiques.

et comme Laurent Binet possède une plume acide et un sens de l'autodérision assez remarquable, ses faiblesses, ses illusions pathétiques et ses angoisses sont relatées de manière très très drôles.

 

Mais bien entendu on ne fait pas que rire, il s'agit quand même d'Heydrich, "la bête blonde", "le bourreau de Prague" et je passe sur d'autres surnoms tout aussi sympathiques dans le genre. Heydrich, celui de la conférence de Wannsee et de la solution finale, celui des camps, de la planification méthodique de la Shoah, celui de l'écrasement de la Tchécoslovalquie sous la botte nazie... celui asssassiné par d'héroïques parachutistes de ce pays martyr.

En fait c'est cela le pivot du livre : l'assassinat de Heydrich par Gabcik et Kubis (et je suis injuste je devrais tous les citer...mais ces deux là sont ceux qui ont tué Heydrich, directement). Ben allez tiens les voici : Adolf Opalka, Josef Valcik, Jaroslav Svarc, Jan Hruby, et Josef Bublik.

 

Comment dire? ce roman m'a envoûtée, obsédée, passionnée. Déjà je suis une psychopathe férue d'histoire, particulièrement le nazisme et la seconde guerre mondiale. Je vous en reparlerai à propos du dernier livre d'Alexandre Jardin ("des gens très bien"). Et là c'est rassurant de voir un écrivain encore plus psychopathe que soi... Car Laurent Binet est totalement obnubilé par cette histoire là, et elle est fascinante. Tous les ingrédients sont là : l'horreur, la barbarie, l'héroïsme, les nazis, les résistants, l'angoisse et bien entendu... Le traitre. J'aimerais citer le nom de clui ci car l'histoire semble l'oublier : Karel Curda, il est celui qui fait tout basculer. Et, sans déflorer le suspens : l'histoire se finit mal, très très mal... évidément.

 

Je crois que j'ai du vendre ce livre à tous les gens que je connais ou presque, je ne compte plus le nombre de fois où j'ai pu dire "tu DOIS livre ce livre"... Mais vraiment quel roman. On rit des égarements, des angoisses de l'auteur, et on tremble de terreur pour les protagonistes tchécoslovaques, on pleure avec les habitants de Prague, on a un goût de fiel dans la bouche quand la vie d'Heydrich est évoquée...

Fascinant.

 

Je ne m'en suis toujours pas remise. Et, en vacances à Prague récemment, j'ai mis un point d'honneur à aller sur les lieux précisés dans le livre. Tous.

Et j'ai frissonné dans la crypte de l'Eglise des Saints Cyrille et Méthode... Vraiment.

Je l'ai relu. Je suis toujours obsédée par cette histoire. Je pense à Gabcik, à Kubis, à Valcik, aux autres, si jeunes, si héroïques, si courageux, et que leur pays même semble oublier. Quelle tristesse.

 

Quel est le secret de Laurent Binet pour ensorceler à ce point le lecteur? Je ne sais pas. Le talent, sûrement.

 

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La chanson qui va bien avec : "né en 17 à Leidenstadt" de Frédéricks-Goldman-Jones

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